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salon dada (1921)

  Le salon Dada, pourquoi? La devise des dadaïstes est depuis j'irai plus loin que ceux qui vont plus vite. Agiter d'une main le voile et de l'autre son voile très remarqué. Ph. Soupault sur son cadre montre sa flèche. La statue de (?) dans tous les journaux japonais. Le portrait de J.R. a été sûrement volé. On dira avec fierté: Rib. Dess. Paul Éluard, Man Ray, B.P. Louis Aragon ont exposé au Salon Dada.
  Nous sommes tout à fait lâches, nous sommes complètement idiots et nous sommes surtout ridicules.

-- Tristan Tzara: Œuvres complètes, Flammarion, 1975.

p. 574 – LE SALON DADA: Brouillon inédit (TZRC 4356) sur papier à en-tête du Petit Grillon. Voir l'historique de cette exposition inaugurée le 6 juin 1921, dans Sanouillet: Dada à Paris, p.276-280; tous les écrivains du groupe devaient y participer, à l'exception de Breton et Picabia. Les initiales qui apparaissent dans ce brouillon sont celles de Jacques Rigaut et de Benjamin Péret.


¬ Une vingtaine de Dadas, français et étrangers, présentent leurs œuvres du 6 au 30 juin dans le hall du Studio des Champs-Elysées, et appliquent un principe de Tzara: que les écrivains réalisent des travaux plastiques (Portrait de Théodore Fraenkel par Aragon, miroir invitant les visiteurs à vérifier leur mine, mais ayant pour titre Portrait d'un imbécile, de Soupault...). Pseudo-tableaux et objets accumulés ne sont pas sans réactiver l'ambiance des successifs Salons des Incohérents de la fin du XIXe siècle, mais sans doute Tzara et ses amis ne le savent-ils pas. En plus de celle de Picabia, deux absences sont notables: celles de Breton et de Duchamp, qui (...) répond qu'il ne veut plus rien exposer (c'est l'époque où il privilégie le jeu d'échecs).

10 juin: Quatre jours après l'ouverture (occasion, une fois de plus, d'une jolie cohue) est organisée une «Soirée Dada»: Soupault, le visage passé au cirage pour incarner le président de la République du Lbéria, inaugure l'accrochage en grande pompe, tendant à chaque participant une bougie allumée, et Aragon parodie (sans grand succès semble-t-il) un évangéliste de choc, Ribemont-Dessaignes lit un (trop) long poème, Tzara un texte que lui a transmis Eluard – le tout est entrecoupé de numéros musicaux, mais surtout de réactions plus ou moins agressives du public. Après l'entracte, la première représentation de la pièce de Tzara Le Cœur à gaz se termine devant une salle hilare, mais qui se vide (...). Deux autres soirées, d'abord annoncées, ne peuvent avoir lieu par suite de désaccords avec la direction des lieux, qui reproche aux Dadas d'avoir saboté, dans les mêmes locaux du Théâtre des Champs-Elysées, une soirée futuriste sur la musique bruitiste de Russolo (perturbation à la suite de laquelle le Salon Dada est d'ailleurs fermé!).

-- [GD] Gérard Durozoi: Histoire du mouvement surréaliste, Hazan, 2004, p.32

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